Mesdames et messieurs les député·es, faites le choix d’une France qui protège les enfants !
Même imparfaite, la proposition de loi qui sera présentée le 11 décembre à l’Assemblée nationale pour lutter contre le sans-abrisme des mineurs non accompagnés, offre des avancées essentielles, estime un collectif de dirigeants d’organisations comme Médecins Sans Frontières (MSF), le Gisti ou le Syndicat de la magistrature. Cette tribune a été initialement publiée dans Libération.
Le 11 décembre, une proposition de loi visant à protéger les mineur·es non accompagné·es et à lutter contre le sans-abrisme des enfants en France sera présentée à l'Assemblée nationale.
Quelle que soit votre sensibilité politique, vous aurez le pouvoir de mettre un terme à une situation intolérable dans notre république : des milliers d'enfants dorment dehors faute d'une protection qui devrait leur être garantie.
Aujourd'hui, en France, de nombreux enfants isolés ne sont pas protégé·es. Il·elles sont laissé·es à la rue pendant des semaines, parfois des mois, en attendant qu'un juge statue sur leur situation et reconnaisse, dans 50 % à 80 % des cas, leur minorité et leur isolement.
Pendant ce temps, ces jeunes filles et garçons, souvent déjà éprouvé·es par l'exil, sont exposé·es à l'errance, à des traitements inhumains et dégradants, à des violences ou encore au risque d'être exploité·es ou soumis·es à l'emprise d'adultes malveillants.
Plongé·es dans une situation de détresse extrême, sans protection, sans hébergement, sans aide financière et sans accompagnement socio-juridique de l'Etat, ils·elles ne peuvent pas subvenir à leurs besoins essentiels.
La plupart présentent des symptômes physiques liés à leurs conditions de vie (douleurs ostéo articulaires, problèmes respiratoires, gastro-entérologiques, dermatologiques ou dentaires). Tou·tes présentent des signes de souffrances psychiques.
Cette proposition de loi demeure une avancée positive essentielle
La proposition de loi numéro 2021 vise à inscrire dans la loi le principe de présomption de minorité en assurant un recours suspensif. Ainsi, dès qu'un juge des enfants est saisi, l'accueil dans les dispositifs de protection de l'enfance doit se poursuivre et ce jusqu'à ce qu'une décision judiciaire définitive soit rendue.
Cette proposition n'est pas parfaite. Elle n'apporte pas toutes les garanties que nous aurions souhaitées. Elle ne répare pas l'ensemble des défaillances des politiques publiques de protection de l'enfance. Mais elle demeure une avancée positive essentielle.
Elle permet de se mettre en conformité avec les garanties prévues par la Convention relative aux droits de l'enfant et les récentes décisions du Comité des droits de l'enfant de l'ONU qui ont condamné la France.
Elle affirme le principe de présomption de minorité, qui doit s'appliquer tout au long de la procédure et tant qu'une décision judiciaire définitive n'est pas intervenue. Elle réaffirme un principe simple, tous les enfants en danger, sans discrimination, doivent être protégé·es au titre de la protection de l'enfance.
L'intérêt supérieur de l'enfant est au-dessus des clivages partisans
Voter cette loi, c'est respecter les principes de la Convention internationale des droits de l'enfant et son interprétation faite par le Comité et appliquer les recommandations du Défenseur des droits, de la CNCDH, de la commission d'enquête parlementaire sur les manquements des politiques publiques de protection de l'enfance ainsi que de l'ensemble des associations et collectifs citoyens qui interviennent auprès de ces adolescent·es.
Rejeter cette loi, en revanche, c'est assumer publiquement la responsabilité de laisser des enfants dormir dehors, au mépris de nos engagements internationaux et alors même qu'une solution législative est à portée de la main.
Nous, associations, collectifs, syndicats et citoyen·nes engagé·es auprès des mineur·es isolé·es depuis de nombreuses années, vous appelons à prendre vos responsabilités afin de faire évoluer les dispositifs de protection de l'enfance et garantir que aucun enfant ne soit laissé sans protection.
Il est temps de placer l'intérêt supérieur de l'enfant au-dessus des clivages partisans. Le 11 décembre, faites le choix de la protection, de la dignité et de la justice. Faites le choix d'une France qui protège les enfants, sans discrimination.
Premiers signataires :
Yann Manzi Délégué général de l'association Utopia 56, Jean-François Corty Président de Médecins du monde France, Camille Niel Cheffe de la mission France de Médecins sans frontières, Madiba Ousmane Guirassy Cofondateur de l'association Comité de vigilance des enfants placés, Judith Allenbach Présidente du Syndicat de la magistrature, Karine Parrot Coprésidente de l'association Groupe d'information et de soutien des immigré·es (Gisti),Sophie Antoine Coordinatrice de l'association InfoMIE, Nathalie Tehio Présidente de la Ligue des droits de l'homme (LDH), Vincent Beaugrand Directeur général de l'association France terre d'asile, Alina Lasry Présidente de l'association Droit à l'école…
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